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Édité et traduit par Mathieu Illana ; Brigitte Gauvin.

CXIX. Diverses espèces de poissons

2. [α] Ambr. hex.5, 3, 7
[α] Ainsi, aussi innombrables sont les espèces de poissons, aussi innombrables sont leurs mœurs. Certains produisent des œufs, comme les poissons assez grands et tachetés que l’on nomme truites, et confient leurs œufs à couver aux eaux. Alors, l’eau donne vie et forme <aux œufs>, et jusqu’à présent cette mère affectueuse des êtres vivants accomplit le devoir que lui impose sa mission comme s’il s’agissait d’une loi éternelle. Certains poissons mettent au monde des petits qui sortent vivants de leur propre corps, comme les énormes cètes, les dauphins, et les phoques, et tous les autres poissons du même type, qui, une fois qu’ils ont mis au monde leurs nouveau-nés, si jamais ils ont pressenti, par hasard, quelque piège ou quelque sujet d’effroi menacer leurs petits, apaisent, par leur soin maternel, leur peur pour les protéger notamment quand ils sont jeunes. D’aucuns rapportent que <les mères> ouvrent leur bouche et saisissent leurs nouveau-nés de leurs dents sans leur faire de mal, ou les accueillent à l’intérieur de leur corps et les cachent dans le ventre qui leur donna naissance. Quel sentiment humain pourrait <donc> imiter l’affection parentale des poissons ? Les baisers sont pour nous suffisants ; pour eux, ce n’est pas assez d’ouvrir leur ventre, puis d’y accueillir et d’y rappeler leurs petits indemnes, et de leur redonner vie une seconde fois, en les réchauffant de leur propre chaleur et les couvrant de leur propre souffle, et enfin, de vivre à deux dans un seul corps, le temps d’offrir sécurité ou de défendre leurs petits contre les dangers, en faisant de leur propre corps un obstacle. Qui, voyant cela, même s’il peut <aussi> éprouver une telle affection, ne serait pas sensible à la si grande tendresse qu’expriment ces poissons ? Qui ne s’émerveillerait pas et ne serait pas stupéfait que la nature préserve dans les poissons ce qu’elle ne préserve pas chez l’homme ? De nombreux hommes, poussés au soupçon par des haines hostiles, tuèrent leurs fils ; d’autres mères infâmes, comme nous le lisons, dévorèrent leurs nouveau-nés : la mère devint un sépulcre pour ses descendants humains. Le ventre de la mère est semblable à un rempart chez les poissons : il conserve les descendants sains et saufs, du fond des entrailles, à la manière d’une palissade.
3. [β] Ambr. hex. 5, 3, 8
[β] Il existe donc différentes espèces de poissons ; chacune présente différentes caractéristiques. Les unes produisent des œufs, les autres accouchent de petits vivants et déjà formés. Ceux qui produisent des œufs ne tissent pas de nids comme les oiseaux, ils ne s’engagent pas dans un travail de longue couvaison <et> ils ne se dérangent pas eux-mêmes pour nourrir <leurs petits>. L’œuf tombe et l’eau l’accueille dans le sein naturel de la mer, comme une nourrice caressante, et fait sortir l’animal à l’issue d’une rapide couvaison. En effet, l’œuf, ballotté par le contact incessant de ce parent de substitution, chute, et le poisson sort de sa coquille.
4. [γ] Ambr. hex.5, 3, 9
[δ] Ambr. hex. 5, 4, 10
[γ] Alors, ensuite, comme la descendance est pure et immaculée puisqu’aucun poisson ne s’unit à une autre espèce que la sienne ! Ils évitent, en effet, les contacts impurs avec les poissons d’espèces différentes, comme <toutes> les espèces qui s’unissent par coït. C’est par la volonté des hommes que sont produites des espèces hybrides issues d’un croisement d’ânes et de juments, ou bien, au contraire, d’une union entre ânesses et chevaux ; ces choses sont, sans nul doute, des altérations de la nature. En effet, dans tous les cas, ce qui voit le jour dans le chaos de la nature est meilleur que ce qui est produit par le sacrilège des hommes. Et quant à toi, l’Homme, agent par lequel cette souillure est imposée à la bête de somme, tu œuvres pour ces choses, et tu considères que cet animal adultérin est plus précieux que l’animal authentique. Toi-même, tu unis des races étrangères, et tu mélanges des souches contraires, et tu contrains souvent ces races, malgré elles, à des unions défendues, et tu appelles cela du travail ! Parce que tu ne peux accomplir de tels actes à l’égard des hommes – en effet l’union des races contraires, chez l’animal, peut exclure toute progéniture – tu soustrais à l’homme la nature qui lui a été donnée à sa naissance et tu dépouilles le mâle de sa virilité ; après avoir retranché un organe du corps, tu détruis sa masculinité, tu fais <de cet homme> un eunuque, de telle sorte que ton audace accomplit ce que la nature a refusé chez l’homme.[δ] Considère donc combien l’eau est une bonne mère !
5. [ε] Ambr. hex. 5, 4, 10
[ε] Toi, l’Homme, tu as enseigné les renoncements des pères envers leurs fils, les séparations, les haines, les offenses ; apprends quel besoin le père et des fils ont l’un de l’autre. Les poissons ne peuvent vivre sans eau, ni être séparés de la compagnie de leur parent, ni être éloignés de l’assistance de leur nourrice, <la mer>. Tout cela obéit à une certaine loi naturelle de telle sorte que, s’ils en sont séparés, ils meurent sur-le-champ.
6. [ζ] Ambr. hex.5, 5, 12
[ζ] Que puis-je ajouter au sujet du nombre de leurs dents ? En effet, <ces animaux> qui vivent dans l’eau, ne possèdent pas, comme les moutons ou les bœufs, des dents sur une seule mâchoire, mais chacune des deux mâchoires est munie de dents ; s’ils mâchaient trop longtemps les aliments et s’ils ne les engloutissaient pas promptement, leur nourriture pourrait être emportée et dispersée, depuis leurs dents, sous l’effet de l’agitation tumultueuse des eaux. Pour cette raison, ils possèdent des dents nombreuses et pointues, afin de pouvoir couper rapidement leur nourriture, la déchiqueter rapidement et la digérer facilement, sans aucun obstacle et sans aucun délai. Enfin, ils ne ruminent pas. Seul cependant le scare, dit-on, rumine, comme le rapportent ceux qui ont eu l’occasion, l’usage ou le goût de l’observer.
7. [η] Ambr. hex. 5, 5, 13
[η] Il est vrai que les poissons eux-mêmes ne peuvent échapper à la puissante violence qu’exercent ceux de leur espèce, et partout, les plus petits sont offerts à l’avidité des plus puissants, et plus un poisson est faible plus il est soumis à la prédation. Certes, la plupart se nourrit d’herbes et de petits vers. Cependant, il existe <aussi> des poissons qui se dévorent mutuellement, et se nourrissent de leur propre chair : le plus petit parmi eux est la nourriture du plus grand, et de nouveau, le plus grand lui-même est saisi par un plus puissant que lui et <alors> le prédateur d’autrui devient une nourriture pour d’autres. C’est pourquoi, il arrive usuellement, alors qu’un poisson en a dévoré un lui-même, qu’il soit dévoré par un autre, et l’un et l’autre, formant une communauté de proie et de châtiment, sont réunis dans un même estomac, en même temps.
8. [θ] Ambr. hex.5, 5, 13
[ι] Ambr. hex.5, 5, 13
[θ] Il se trouve que cette violence s’est accrue spontanément dans les poissons eux-mêmes ; comme chez nous, elle ne tire pas son origine de la nature, mais de la cupidité. Ou bien, parce que <les poissons> ont été offerts à l’usage des hommes, ils ont aussi été créés comme autant de signes pour que nous vissions en ceux-ci la corruption de nos mœurs et pour que nous prissions garde aux exemples qu’ils nous donnent, et pour que personne de plus puissant n’attaquât un plus faible, alors qu’il serait sur le point de donner, contre lui-même, à un encore plus puissant que lui l’exemple d’une injustice. C’est pourquoi, celui qui nuit à un autre prépare pour lui-même un filet dans lequel il est destiné à tomber lui-même.[ι] Et quant à toi, toi qui attaques les entrailles d’un autre poisson, qui écrases le faible <et> qui poursuis continuellement, dans les profondeurs de la mer, celui qui a <pourtant> confiance en toi, tu es un poisson. Prends garde, en poursuivant un autre, à ne pas toi-même tomber sur un plus fort que toi, et à ce que celui qui évite tes embûches ne t’attire pas dans celles d’un autre ; avant de souhaiter vivement ta perte, alors que tu le poursuivais, il craignait fortement la sienne.
9. [κ] Isid. orig.12, 6, 30
[κ] Le scare (escarius) a été ainsi nommé parce que lui seul, à ce qu’on rapporte, rumine sa nourriture (esca) ; autrement dit, les autres poissons ne ruminent pas. D’aucuns rapportent qu’il est habile, que s’il est enfermé dans des nasses, il ne se précipite pas frontalement, et qu’il n’introduit pas sa tête dans les dangereux entrelacs d’osier, mais que, se plaçant en sens inverse, par de nombreux coups de queue, il élargit les ouvertures et sort ainsi à reculons. Si par hasard, un autre scare le voit lutter, après lui avoir saisi la queue avec les dents, il soutient les efforts du fugitif.
10. [λ] Isid. orig.12, 6, 34
[λ] Et le rémora, un petit poisson d’un demi-pied, a pris son nom de ce qu’il retarde un navire en s’attachant à lui. Bien que les vents se précipitent, bien que les tempêtes se déchaînent, cependant le navire semble s’arrêter comme s’il s’était enraciné dans la mer, et il ne peut pas bouger ; c’est le rémora qui réalise tout cela, non pas en le retenant, mais seulement en s’y attachant. Les latins l’appellent mora (« retard ») parce qu’il contraint les bateaux à s’arrêter.
11. [μ] Isid. orig.12, 6, 41
[μ] C’est sa ressemblance avec le serpent (anguis) qui donna son nom à l’anguille (anguilla). Elle naît de la boue. Quels que soient le lieu et le moment où on la saisit, elle est si lisse que plus vigoureusement on la presse, plus vite elle s’échappe. D’aucuns rapportent que le fleuve de l’Orient, le Gange, fait naître des anguilles de trente pieds chacune. Lorsque des anguilles sont tuées dans du vin, ceux qui en auront bu éprouveront une répugnance à l’égard du vin.
12. [ν] Isid. orig. 12, 6, 43
[ν] Les Grecs appellent la murène mirina, et cela parce qu’elle s’enroule sur elle-même en cercle, à ce qu’on dit. On rapporte qu’il n’existe qu’un sexe chez les murènes, celui de la femelle, et que la murène se reproduit en s’accouplant avec le serpent. À cause de cela les pêcheurs l’attirent en sifflant, comme s’il s’agissait d’un serpent sifflant, et la capturent <ainsi>. On la tue difficilement par un coup de bâton, aussitôt au moyen de la férule. Il est indiscutable que sa vie réside en sa queue, car si on la frappe à la tête, on peine à la tuer ; si on la frappe à la queue, elle expire aussitôt.
13. [ξ] Isid. orig.12, 6, 44
[ξ] Le poulpe est le multipes (« nombreux pieds ») ; en effet, il possède de très nombreux bras. Il est habile à approcher un hameçon, il le saisit de ses bras, mord l’appât, et il ne le relâche pas avant d’avoir rongé tout autour la nourriture.
14. [ο] Isid. hex. 12, 6, 45
[ο] La torpille (torpedo) est ainsi appelée parce qu’elle ferait s’engourdir (torpescere) le corps, si quiconque la touchait vivante. Pline le Jeune raconte : « Si la torpille de l’Océan Indien était touchée, même de loin et depuis une grande distance, par une lance ou par une baguette, les muscles du pêcheur, tout vigoureux soient-ils, s’engourdiraient <et> la torpille enchaînerait ses pieds, si rapides soient-ils à la course. » En effet, sa vigueur est si grande que même les effluves de son corps peuvent affecter les membres d’un <autre> corps.
15. [π] Ambr. hex.5, 8, 22
[π] Par ailleurs, quelles ruses le crabe ne manigance-t-il pas pour obtenir sa nourriture ! Car il est charmé par l’huître, et aspire à se procurer un festin de chair d’<huître>. Mais de même qu’il cherche à atteindre sa nourriture, de même il prévoit simultanément le danger, puisque la chasse est, d’une part, difficile, d’autre part, dangereuse. Cette chasse est difficile parce que la nourriture est enfermée à l’intérieur de coquilles très solides, car la nature, interprète d’un ordre supérieur, a abrité la tendre chair <des coquillages>, comme <derrière> des murailles ; l’huître nourrit et réchauffe cette chair dans le creux des valves de sa coquille, comme si elle déployait <autour d’elle>une sorte de rempart. Et pour cette raison, toutes les tentatives du crabe sont vaines, parce qu’il ne peut ouvrir une huître close, quelle que soit sa force. Et cette chasse est dangereuse si <la coquille> se referme sur sa pince. Il recourt <donc> à certains expédients et prépare un piège en usant d’une tromperie inouïe. C’est pourquoi, parce que toutes les espèces sont flattées par le plaisir, il guette les moments où l’huître, se trouvant dans des lieux éloignés de tout vent, ouvre sa coquille bivalve à la rencontre des rayons du soleil et délie le verrou de <sa> coquille, de telle sorte qu’elle puisse faire profiter ses parties internes de l’air libre. Et alors, en introduisant, à la dérobée, un petit caillou, il entrave la fermeture de l’huître, et trouvant ainsi ouvert le verrou <de la coquille>, il insère ses pinces en toute sécurité et consomme la chair du coquillage.
16. [ρ] Ambr. hex.5, 8, 23
[ς] Prv.15, 16
[σ] Prv.15, 17
Ainsi, ce sont donc des hommes vicieux, [ρ] ceux qui, à la manière du crabe, se portent insidieusement vers la manigance pour nuire à autrui et qui étayent la faiblesse de leur propre vertu par la ruse. Ils ourdissent une tromperie à l’encontre d’un frère, et se nourrissent de la tribulation d’un autre. Quant à toi, satisfais-toi de ce qui t’est propre, et ne te repais pas des malheurs d’autrui. La simplicité de l’innocence est une excellente nourriture. Bénéficiant de ses propres talents, l’innocent ignore comment tendre des embûches à d’autres, et ne brûle pas des feux de la cupidité ; pour lui, tout gain est une perte pour la vertu, un aiguillon pour la convoitise. Et pour cette raison, elle est bienheureuse, la pauvreté, si l’on a appris à reconnaître ses propres biens, véritablement, et elle doit être préférée à tous les trésors parce que [ς] mieux vaut une petite quantité de biens, accompagnée de la crainte de Dieu, que de grands trésors, dépourvus de cette crainte ; [σ] mieux vaut, en effet, offrir à ses hôtes des légumes accompagnés de bienveillance que des apprêts de veaux gras accompagnés de dissentiment.
17. [τ] Ambr. hex. 5, 8, 23
[τ] Usons donc de notre habilité pour rechercher la bienveillance et protéger le salut commun, non pour tromper l’innocence d’un étranger. Il nous est permis de faire usage des exemples inspirés de la mer pour le progrès de notre salut, non pour mettre autrui en péril.
18. [υ] Ambr. hex.5, 9, 24-25
[φ] Mt, 6, 30
[χ] Mt 6, 26
[ψ] Job, 38, 41
[ω] Job, 39, 25.
[αα] Mt, 6, 28
[αβ] Ps.103, 24
[αγ] Mt, 6, 26
[αε] Mt, 6, 30
[υ] L’oursin, animal petit, ordinaire et méprisable – dans la mesure où je parle de l’animal marin –, annonce les tempêtes ou le calme à venir et constitue couramment un informateur pour les navigateurs. Ainsi, lorsqu’il a pressenti une tempête, l’oursin saisit un petit caillou assez gros, le transporte comme un lest et le tire comme une ancre, afin de ne pas être malmené par les flots. C’est pourquoi il ne se libère pas par ses propres forces, mais il se maintient solidement et garde le contrôle au moyen d’un poids extérieur. En observant ce comportement judicieux, les matelots l’interprètent comme un signe d’une tempête à venir et prennent pour eux-mêmes des précautions, afin qu’un orage imprévu ne les prenne pas au dépourvu ; quel mathématicien, quel astrologue, ou quel Chaldéen peut concevoir ainsi le cours des astres et les mouvements et les signes du ciel ? Par quelle ingéniosité cet animal rassemble-t-il ces présages, par quel savant les reçoit-il ? Qui fut, pour lui, l’oracle d’un si grand présage ? Souvent, les hommes aperçoivent le trouble de l’air et souvent, ils se trompent, parce que la plupart du temps, il se disperse, sans qu’aucune tempête n’advienne. L’oursin ne se trompe pas : de tels signes, qu’il fait siens, n’échappent en aucune manière à l’oursin. De là vient, chez ce petit animal, une science assez grande pour prédire les événements futurs, bien qu’il n’y ait rien de plus en lui qu’une très grande prévoyance. Crois <bien> que c’est grâce à la bienveillance du Seigneur de toutes choses que cet <animal> a aussi reçu le don de cette prescience. En effet, [φ] si Dieu habille le foin de sorte que nous l’admirons, [χ] S’il nourrit les oiseaux, [ψ] s’il fournit aux corbeaux leur nourriture, puisque leurs petits crient vers le Seigneur, et s’il confia, aux femmes, la connaissance du tissage, s’il n’abandonne pas l’araignée dépourvue de sagesse, elle qui cependant suspend aux portes, avec finesse et habilité, ses amples toiles, [ω] s’il accorde lui-même du courage au cheval, et libère celui-ci de la crainte qui pèse sur son échine, afin qu’il bondisse dans les champs et qu’il satisfasse les rois en galopant au-devant d’eux ; <le cheval> flaire la guerre à distance, il est stimulé par le son de la trompette. Si <Dieu>, par la conformation de son intelligence, emplit <de son souffle> la plupart de ces animaux et ces autres choses dépourvues de raison [αα] comme l’herbe, comme les lis, pourquoi doutons-nous de ce que <Dieu> a déposé la grâce de cette prescience même dans l’oursin ? En effet, Dieu ne laisse rien qui n’ait été mis à l’épreuve, rien qui ait été négligé. Il voit toutes choses, lui qui nourrit toutes choses ; [αβ] il remplit toutes choses de sa sagesse, lui qui fit toutes choses dans sa sagesse, comme il a été écrit. Et pour cette raison, si <Dieu> n’a pas négligé l’oursin, s’il ne l’a pas privé de sa visite, s’il lui prête attention et l’instruit par des signes des temps futurs, ne prête-t-il pas attention à tout ce qui te concerne ? Mais si, il te prête attention, comme en témoigne sa sagesse divine, lorsqu’elle dit : [αγ] « S’il prend soin des oiseaux […] et […] s’il les nourrit, n’êtes-vous pas, vous, de plus grande valeur qu’eux ?[αδ] [αε] Si Dieu revêt ainsi le foin des champs, lequel est présent aujourd’hui et demain est envoyé au feu, combien plus Dieu vous revêt-il <de bienfaits>, vous <hommes> de très peu de foi ? »
19. [αζ] Isid. orig. 12, 6, 48
[αζ] Les coquillages et les escargots ont été appelés ainsi, parce qu’ils se creusent lorsque la lune décroît, c’est-à-dire qu’ils se vident <de leur chair>. En effet, le corps de tous les animaux de mer enfermés <dans une coquille> et de tous les coquillages gonfle lors de la croissance de la lune, il se vide lors de sa décroissance. En effet, alors que la lune est croissante, elle augmente la quantité des humeurs ; mais alors qu’elle se met à décroître, les humeurs diminuent ; c’est en effet ce que disent les naturalistes. Concha (coquillage) est le premier nom à avoir été donné, mais Coclea (« escargot ») est employé comme diminutif, au sens de « petite coquille » (concula).
20. [αη] Isid. orig.12, 6, 49
[αη] Il existe de nombreuses espèces de coquillages, parmi lesquelles il y a aussi celles qui produisent des perles, qui sont appelées occeloe, <et> dans la chair desquelles une précieuse petite perle se solidifie. Ceux qui ont écrit à propos de la nature des êtres animés disent de ces espèces qu’elles cherchent à gagner les rivages durant le temps de la nuit et qu’elles conçoivent de la rosée céleste une perle. Il en résulte qu’elles sont aussi nommées occeloe.
21. [αθ] Isid. orig.12, 6, 50
[αθ] Le murex (murica) est un escargot de mer, ainsi nommé à cause de ses piquants et de sa dureté ; il est aussi nommé d’un autre nom, « pourpre » (conchilium), pour la raison suivante : après avoir été découpé par un objet en fer, il émet des larmes de couleur pourpre, à partir desquelles on teint la pourpre et, pour cette raison, il a été appelé ostrum (« pourpre ») parce que cette teinture est extraite du liquide issu de sa coquille.
22. [αι] Isid. orig. 12, 6, 51
[αι] On dit que les crabes sont appelés <ainsi>, parce qu’il s’agit de coquillages qui possèdent des pattes ; ce sont des animaux hostiles aux huîtres, car ils vivent, avec une étonnante habilité, de leur chair. En effet, parce qu’il ne peut ouvrir la solide coquille de l’huître, le crabe guette le moment où l’huître ouvre le verrou de sa coquille ; alors, le crabe y jette, subrepticement, un petit caillou et, après avoir entravé la fermeture de l’huître, il en dévore les chairs. D’aucuns rapportent que, si on attache dix crabes à une poignée de basilic, tous les scorpions qui sont dans les parages se réuniront en ce lieu. Il existe deux espèces de crabes : les crabes d’eau douce et les crabes de mer.
23. [ακ] Isid. orig.12, 6, 52
[ακ] L’huître (ostrea) est nommée ainsi à cause de sa coquille, à l’intérieur de laquelle sa tendre chair est protégée ; les Grecs, en effet, appellent la coquille ostrum. Le mot ostrea est, dit-on, du genre neutre, mais féminin quand il désigne les chairs.
24. [αλ] Isid. orig. 12, 6, 53
[αλ] Les moules sont, comme nous l’avons mentionné auparavant, des escargots, grâce à la laitance desquels les huîtres conçoivent, et les moules (musculi) ont été appelées ainsi en référence aux « mâles » (masculi).
25. [αμ] Isid. orig.12, 6, 56
[αμ] La tortue a été nommée ainsi parce qu’elle est complètement couverte par une carapace qui la protège à la manière d’une voûte. Il existe quatre espèces <de tortue> : les tortues terrestres ; les tortues marines ; les tortues de vase, vivant dans le bourbier et les marécages ; la quatrième espèce correspond aux tortues de rivière, qui vivent en eau douce. Certains rapportent, ce qui est incroyable, que les navires transportant un pied droit de tortue avancent plus lentement.
26. [αν] Isid. orig.12, 6, 58-59
[αν] Les grenouilles sont appelées ainsi à cause de leur coassement parce que les marécages résonnent autour d’elles lorsqu’elles se reproduisent et qu’elles émettent des coassements en d’agaçantes clameurs. Parmi elles, certaines sont dites aquatiques, certaines de marécage ; certaines, qui sont appelées rubetae à cause du fait qu’elles vivent dans les ronces (rubeta), sont plus grandes que toutes les autres. D’autres, qui sont appelées calamites (grenouilles vertes), puisqu’elles vivent parmi les roseaux (calami) et les buissons, sont les plus petites et les plus vertes de toutes ; elles sont silencieuses et sans voix. Les agredulae (grenouilles des champs) sont de très petites grenouilles séjournant sur une terre aride ou dans des champs, lieux d’où elles tirent même leur nom. D’aucuns affirment que les chiens n’aboient pas, si on leur fait avaler une grenouille vivante.
27. [αξ] Isid. orig.12, 6, 63
[αξ] Pline dit que les noms de tous les animaux vivant dans les eaux, au nombre de cent quarante-quatre, ont été répartis en <différentes> espèces de monstres, de serpents communs de terre et d’eau, de crabes, de coquillages, de langoustes, de palourdes, de poulpes, de soles <et> de maquereaux, <et> en <différentes> espèces telles que le calmar et toutes les espèces du même genre.