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VII.

2. [α]  Mt, 13, 47*
[β]  Ps, 23, 2*
[γ]  Mt, 10, 16*
17. Ne sois pas ému du fait que j’emploie « Évangile » pour « mer ». L’Évangile est là où le Christ a marché. L’Évangile est là où Pierre, bien qu’il ait chancelé dans son reniement, a cependant trouvé la grâce d’une position ferme soutenu par la main droite du Christ, rempart de sa foi. L’Évangile est là d’où le Martyr s’est élevé[α] . L’Évangile est la mer, c’est là que pêchent les apôtres, là qu’ils envoient leur filet, elle qui est semblable au royaume des cieux. L’Évangile est la mer, la mer dans laquelle le Christ a opéré ses miracles. L’Évangile est la mer, elle qui a permis la fuite de l’Hébreu et qui a tué l’Égyptien. L’Évangile est la mer, parce que l’Église, épouse du Christ et plénitude de la grâce divine, fut fondée sur les mers, comme l’a dit le prophète : [β] « C’est lui qui la fonda sur les mers. » Bondis par-dessus les vagues, homme, puisque tu es un poisson ; que les flots de ce monde ne te retiennent pas : s’il y a une tempête, gagne la haute mer et les profondeurs ; si le temps est calme, joue dans les flots ; s’il y a beaucoup de vent, prends garde aux écueils du rivage, ne va pas, balloté par la fureur des vagues, te briser sur les rochers. En effet, il est écrit : [γ] « Soyez rusés comme les serpents. »
3. [δ]  1 Tim. 2, 14*
18. Et puisqu’on a pris pour exemple la ruse des serpents, soyons rusés pour ce qui est de rechercher et de préserver des mariages : apprécions les unions qui sont notre lot. Si des personnes qui se trouvaient éloignées l’une de l’autre au moment de leur naissance s’unissent, ni l’éloignement, ni l’abstinence ne devront entamer leur amour mutuel, pas même si le mari se rend à l’étranger. La même loi rassemble ceux qui sont absents et ceux qui sont présents, le même lien naturel renforce les lois de l’amour conjugal entre ceux qui sont éloignés comme entre ceux qui sont ensemble. Leurs nuques sont réunies sous un même joug de bénédiction, même si l’un doit partir dans une région lointaine, causant une longue séparation, car ce n’est pas le corps mais l’esprit qui reçoit le joug de la grâce. La vipère, espèce de bête des plus odieuses, et plus rusée que ne le sont toutes les autres espèces de serpents, lorsque la gagne le désir de s’accoupler, recherche une union avec une murène de la mer déjà connue d’elle, ou s’en ménage une nouvelle : s’étant avancée jusqu’au rivage et annoncée d’un sifflement, elle invite la murène à un accouplement. La murène, pour sa part, ne décline pas l’invitation, et accorde, comme demandé, le loisir de l’étreindre au serpent venimeux. Que signifie un tel discours, si ce n’est qu’il faut supporter les habitudes de son époux et, s’il est loin, attendre son retour, même s’il est brutal, hypocrite, grossier, lubrique, ivrogne ? Quoi de pire que le venin, que la murène ne fuit pas chez son époux ? Elle ne refuse pas l’invitation, embrasse le serpent visqueux dans une étreinte empressée. Il supporte tes défauts et ta faiblesse de femme légère, et toi, femme, tu ne peux pas supporter ton mari ? [δ] Adam a été trompé par Ève, et non Ève par Adam. L’homme que la femme a conduit à la faute, il est juste qu’elle le prenne pour guide, afin que la faiblesse féminine ne le fasse pas chanceler de nouveau. Mais il est inculte et grossier ? Il te plaisait au début ! Dois-tu changer constamment de mari ? Le bœuf et le cheval recherchent et aiment leurs compagnons, et si l’un vient à être remplacé, l’autre ne sait pas porter le joug avec un nouveau compagnon, et il pense ne plus être totalement lui-même ; mais toi, tu méprises ton époux, et penses qu’il faut en changer souvent : s’il s’absente une journée, tu prends un amant, et aussitôt, sans que l’affaire ait été instruite, mais faisant comme si elle l’avait été, tu portes atteinte à la pudeur. La vipère recherche l’absent, l’appelle, le réclame d’un doux sifflement et, lorsqu’elle sent son compagnon approcher, crache son venin en signe de respect pour son époux, pleine de vénération devant la grâce du mariage : toi, femme, tu repousses, par tes outrages, ton mari tout juste revenu de très loin ! La vipère observe la mer, scrute le chemin qu’emprunte son compagnon ; toi, tu fermes la porte à ton mari par tes manquements, tu sécrètes le venin des disputes, et tu ne le déposes pas, tu craches ton sinistre poison au moment même où tu étreins ton mari. Tu déshonores ton mariage et tu ne respectes pas ton époux.
4. [ε]  Prov, 23, 33*
19. Mais toi aussi, le mari, (nous pouvons aussi, en effet, comprendre ainsi cet exemple), oublie l’orgueil de ton cœur, la rudesse de tes mœurs, lorsque ta femme accourt vers toi avec empressement, chasse ta mauvaise humeur lorsque ta douce épouse te réclame de l’affection. Tu n’es pas son maître, mais son mari. Ce n’est pas une servante que tu as obtenue, mais une épouse. Dieu a voulu que tu sois un guide pour le sexe inférieur, et non un tyran. Aime-la en retour, réponds à son amour. La vipère se vide de son venin : ne peux-tu pas, toi, déposer la dureté de ton âme ? As-tu une sévérité naturelle ? Tu dois la tempérer par égard pour ton mariage et laisser de côté la férocité de ton esprit par respect pour le lien conjugal. Il peut en être ainsi. Ne recherchez pas, maris, une couche étrangère, ne vous laissez pas prendre au piège d’une nouvelle relation. Grave est l’adultère, et contre nature. Dieu a d’abord fait deux êtres humains, Adam et Ève, c’est-à-dire l’homme et la femme, et la femme à partir de l’homme, c’est-à-dire de la côte d’Adam, et il leur a ordonné à tous deux de ne former qu’un seul corps, et de ne vivre qu’avec une seule âme. Pourquoi diviserais-tu un seul et même corps ? Et pourquoi diviserais-tu un seul et même esprit ? C’est un adultère aux yeux de la nature. Voici ce que nous enseigne l’étreinte de la murène et de la vipère, qu’elles recherchent non pas selon la loi de leur espèce, mais sous l’effet d’un désir ardent : apprenez ainsi, maris, de quel serpent il cherche la couche, à quel serpent il va s’unir, celui qui cherche à conquérir l’épouse d’un autre : il se hâte vers la vipère qui se glisse dans son sein non par le chemin, direct, de la vérité, mais par les détours d’un amour trompeur. L’homme adultère se hâte vers la femme qui reprend son venin, comme la vipère, dont on dit qu’elle récupère le venin qu’elle avait craché, quand l’étreinte est terminée : l’adultère est une vipère. Ainsi Salomon a dit : « Celui qui est ivre, lorsque son désir s’échauffe sous l’effet du vin, il est étendu comme s’il avait été mordu par une couleuvre, et le venin se répand en lui comme s’il avait été mordu par le céraste. » Et, pour que tu saches ce qu’il a dit de l’adultère, il a ajouté : [ε] « Lorsque tes yeux auront vu l’étrangère, ta bouche ne dira plus que des paroles vicieuses. » (Ibid., 33)
5. 20. Que personne ne s’imagine que nous avons tenu des propos contradictoires, en prenant cette vipère pour exemple du bien et du mal, puisque l’un et l’autre comportement sont utiles à notre formation : soit que nous rougissions de ne pas montrer de fidélité à l’être aimé, à qui le serpent en montre, soit que, délaissant les liens sacrés du mariage, nous préférions aux unions salutaires celles qui sont trompeuses et nuisibles, comme le fait celui qui s’unit au serpent.