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VII. De cocodrillo [le crocodile1]

2. [α] Sol. coll. 32, 22-23
[α] Plin. nat. 8, 89
[α] JV, Or. 88
[β] Sol. coll. 32, 23
[γ] ?
[δ] TC
[ε] Sol. coll. 32, 23
[ε] JV, Or. 88
[ζ] Plin. nat. 8, 94
[η] JV, Or.  88
[θ] Exp. 13, 67, 8
[ι] Exp. 13, 67, 12
[κ] TC
[λ] JV, Or. 88
[μ] Hor. epod. 12, 10-11
[ν] TC?
[α] Le crocodile est un animal quadrupède, à ce que disent Jacques de Vitry, Solin et Pline2, qui est aussi fort sur terre que dans l’eau du fleuve3. Pendant la journée il se repose très souvent sur terre et reste alors si immobile, comme pour inviter, par sa gueule grande ouverte, les oiseaux à venir se restaurer, que, si on ne connaissait pas les mœurs de ce monstre, on le croirait mort. Mais la nuit, il reste dans les eaux. Il pond des œufs semblables à des œufs d’oie qu’il porte à terre, là où, bien évidemment, les crues du fleuve ne peuvent les y atteindre. Le mâle et la femelle s’emploient tour à tour à couver les œufs4. Selon Jacques de Vitry, ce monstre grandit la plupart du temps jusqu’à atteindre vingt coudées5. Sa peau très dure le protège, comme le ferait un bouclier. Il n’a pas de langue.6 Sa gueule s’ouvre jusqu’aux oreilles7. Sa mâchoire supérieure est mobile8. Il inflige des morsures horribles et durables : ses rangées de dents s’imbriquent en effet pour former comme un peigne. [β] Ainsi, en ouvrant grand la gueule, il invite les oiseaux à venir se restaurer. [γ] ll ferme les yeux et feint de dormir, en gardant la gueule grande ouverte. Alors les oiseaux viennent se poser en croyant pouvoir manger et il les tue et les dévore9. [δ] Et en cela il est l’image des usuriers, qui invitent les marchands démunis et sans ressources à emprunter, ou des princes qui invitent leurs fermiers à s’enrichir et qui après, sautant sur une occasion, les dépouillent cruellement. [ε] Le crocodile est armé de griffes monstrueuses. [ζ] En hiver, il n’absorbe aucune nourriture. [η] Il attaque non seulement les animaux mais aussi les hommes, [θ] et pourtant, selon l’Experimentator, quand il a tué un homme, il le pleure10. [ι] Le crocodile vit encore un peu quand on lui a arraché le cœur, [κ] contrairement à tous les autres animaux dont la vie dépend du cœur. [λ] Les Sarrasins mangent sa chair. [μ] De ses excréments on fait un onguent dont les ribaudes âgées et ridées enduisent leur visage, ce qui donne à leur peau relâchée un aspect tendu et les rend plus belles11. [ν] Mais ce fond de teint ne dure que peu de temps. Car quand la sueur ou l’eau touchent ces onguents obscènes, la couleur artificielle jaunit sur le visage, et celle qui s’est maquillée devient plus pâle encore ; et puisse cet effet durer toujours ! Mais, pour le malheur de celle qui l’utilise, le teint coloré obtenu grâce à cet onguent disparaît quand on lave le visage à l’eau, et les sillons habituels des rides réapparaissent aussitôt sur la peau.
3. [ξ] JV, Or. 88
[ο] ?
[ξ] C’est dans le fleuve Nil, à ce que dit Isidore, et dans un fleuve de Césarée en Palestine qu’on trouve le plus de crocodiles. À ce qu’écrit Jacques de Vitry, on trouve les monstrueux crocodiles dans un fleuve de Palestine, [ο] et voici comment ils y sont venus. Il y avait deux frères de noble naissance qui exerçaient le pouvoir sur les mêmes contrées. Comme l’un d’eux ne supportait pas de partager le pouvoir avec son frère, il fit importer l’espèce des crocodiles dans le fleuve, afin que son frère, qu’il n’osait pas tuer ouvertement, se fît dévorer, sans qu’on le soupçonnât, par les monstres, tandis qu’il prendrait son bain dans le fleuve, comme à son habitude. Le temps passa, et le frère jaloux, oubliant ce qu’il avait fait, s’assit sur la rive du fleuve. Aussitôt, sans qu’il s’y attendît, un de ces monstres sortit sur le rivage et, après avoir saisi dans sa gueule l’homme assis là, il le mit en pièces, et le malheureux périt, tombant dans le piège qu’il avait lui-même ourdi12.
4. [π] Plin. nat. 8, 90
[ρ] TC
[ς] Plin. nat. 8, 92
[σ] Plin. nat. 8, 93
[τ] Plin. nat. 8, 94
[π] Lorsque cette bête, selon Pline, est rassasiée de poissons et s’abandonne au sommeil sur la rive, la gueule encore pleine de nourriture, un petit oiseau qu’on appelle là-bas trochilos, mais en Italie « roi des oiseaux », l’invite à ouvrir la gueule pour y chercher à manger. Il lui râcle d’abord la gueule, puis les dents, puis l’intérieur du gosier, et enfin le monstre avale l’oiseau qui s’est introduit comme un trait dans sa gueule.13 [ρ] Mais à quoi bon manger un si petit oiseau, quand on est une si grosse bête ? C’est simplement que l’occasion fait le larron. Sur ce point, le crocodile est l’image des princes injustes : sa gueule représente les traîtres sans scrupules qui portent la paix dans leurs discours et la malice dans leur cœur ; ses dents représentent les fermiers qui dépouillent les pauvres ; et son gosier, les conseillers privés. Un pauvre paysan vient parfois vers tous ces hommes ; il demande le gouvernement d’une ferme, et en corrompant tous ces personnages par des dons et des promesses, qu’il fait sur ses propres fonds, il obtient l’accord. Mais dès qu’il croit avoir obtenu satisfaction, on le dépouille non seulement des biens dont il s’est emparé, mais aussi de tous ses biens propres. [ς] Il existe, autour des rives du Nil, un peuple qui est l’ennemi et l’adversaire naturel de cette bête ; on appelle ces hommes Tyntiri d’après le nom de l’île qu’ils habitent14. Ils sont de petite taille, mais déploient un grand courage contre ces bêtes. [σ] Ils sont les seuls à oser se baigner dans les eaux du Nil, où vivent les crocodiles, ils leur sautent sur le dos et les montent comme des chevaux. Ainsi, quand les bêtes ouvrent la gueule, tête en arrière, leur cavalier y glisse un bâton qu’ils tiennent à droite et à gauche comme un mors, et ils les mènent au rivage, captifs ; et en les effrayant de leur seule voix, ils les contraignent à vomir les corps qu’ils ont avalés peu de temps avant. [τ] Certains ont cru que cet animal a une croissance continue, comme l’ours15