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Édité et traduit par Brigitte Gauvin ; Catherine Jacquemard ; Marie-Agnès Lucas-Avenel.XLVI. De lepore maris [le « lièvre de mer » [l’aplysie ? le poisson-globe ?1identificationDans le livre 9, Pline semble distinguer deux types de lièvres de mer, l’un qui vit dans les mers occidentales, l’autre dans les mers de l’Inde (In nostro mari offa informis, colore tantum lepori similis, in Indis et magnitudine et pilo, duriore tantum (Plin. nat. 9, 155), « dans notre mer, c’est une boule informe qui ne ressemble au lièvre que par la couleur, dans l’Inde, il en a aussi la taille et le poil qui est seulement plus dur » (De Saint-Denis 1955, 87)). Dans une note à ce passage, De Saint-Denis 1943, 132, identifie le lièvre avec une grosse limace de mer, l’aplysie (Aplysia Linné, 1758), qu’il décrit ainsi : « tête portée sur un cou plus ou moins long ; deux tentacules supérieurs et creusés comme les oreilles de quadrupède ; une glande particulière verse, par un orifice situé près de la vulve, une humeur limpide qu’on dit fort âcre dans certaines espèces ». Les espèces depilans et leporina seraient particulièrement nocives. On trouve aussi dans De Saint-Denis 1947, 54-55, la description de J. Oberthür : « Le lièvre de mer atteint la taille d’un petit levraut. Lorsqu’elle [l’aplysie] bosse le dos, tapie dans l’herbier, avec sa couleur fauve, camouflée de taches jaune clair, on dirait un peu un capucin au gîte, dans l’herbe de la prairie, d’autant plus que l’aplysie rabat d’avant en arrière ses cornes allongées et aplaties comme des oreilles ». Cependant, peu avant de traiter du lièvre de mer, Pline a consacré un court passage à l’aplysie, qu’il classe dans les éponges et ne semble pas associer au lièvre (Pessimum omnium genus est earum quae aplysiae uocantur, quia elui non possunt ; in quibus magnae sunt fistulae et reliqua densitas spissa (Plin. nat. 9, 150), « L’espèce la plus mauvaise de toutes est celle qu’on appelle aplysie, parce qu’il est impossible de la nettoyer ; ses tuyaux sont grands et le reste de sa masse est compacte » (De Saint-Denis 1955, 85)). Thomas de Cantimpré suit Pline en consacrant deux chapitres à deux types de lièvres. Dans leur commentaire à Albert le Grand (AM 24, 72 (39)) – qui lui aussi distingue deux types de lièvre de mer, réunis dans un même chapitre –, Kitchell & Resnick 1999, 1688, suivent D’Arcy Thompson 1947, 142-143, et suggèrent que le lièvre très toxique de l’océan Indien pourrait être le poisson-globe (Diodon Linné, 1758), et le lièvre moins dangereux des mers occidentales, l’aplysie.]
[β] Plin. nat.32, 58
[α] Le lièvre de mer est très toxique, à ce qu’en dit Pline. Celui de la mer Indienne est si nocif que, par le seul contact, il provoque immédiatement des vomissements et des troubles de l’estomac. Dans notre mer le lièvre est informe, semblable au lièvre terrestre par la couleur et la taille, avec le poil plus dur. Ce poisson, et d’autres avec lui, a pour ennemi la pastenague, un poisson vraiment dangereux, qui les transperce, comme d’une épée2philologieThomas dispose d’une version fautive de sa source, si bien que le passage est obscur. Une partie de la tradition manuscrite de Pline fournit un texte plus satisfaisant : illos perforat vi ferri venneni malo, « il les transperce avec la force du fer et la nocivité du poison »., de la nocivité de son venin. Les poissons qui cherchent à lui échapper pour éviter ses coups se fichent dans les racines des arbres3traductionLa source de Thomas de Cantimpré est indubitablement Pline, mais sans doute dans une version très fautive. Les informations sont déformées, notamment celles sur la pastenague, et l’ordre des mots tout à fait étrange..[β] Mais si on a été mordu par ce poisson, la cendre de celui-ci fournit un remède4traductionOn trouve le même problème de déformation dans ce passage. Chez Pline, c’est la cendre de tête de murène qui est efficace contre ses propres morsures ; contre le poison du lièvre de mer, Pline recommande les hippocampes ou les crabes..
Notes philologiques :
2. Thomas dispose d’une version fautive de sa source, si bien que le passage est obscur. Une partie de la tradition manuscrite de Pline fournit un texte plus satisfaisant : illos perforat vi ferri venneni malo, « il les transperce avec la force du fer et la nocivité du poison ».
Notes d'identification :
1. Dans le livre 9, Pline semble distinguer deux types de lièvres de mer, l’un qui vit dans les mers occidentales, l’autre dans les mers de l’Inde (In nostro mari offa informis, colore tantum lepori similis, in Indis et magnitudine et pilo, duriore tantum (Plin. nat. 9, 155), « dans notre mer, c’est une boule informe qui ne ressemble au lièvre que par la couleur, dans l’Inde, il en a aussi la taille et le poil qui est seulement plus dur » (De Saint-Denis 1955, 87)). Dans une note à ce passage, De Saint-Denis 1943, 132, identifie le lièvre avec une grosse limace de mer, l’aplysie (Aplysia Linné, 1758), qu’il décrit ainsi : « tête portée sur un cou plus ou moins long ; deux tentacules supérieurs et creusés comme les oreilles de quadrupède ; une glande particulière verse, par un orifice situé près de la vulve, une humeur limpide qu’on dit fort âcre dans certaines espèces ». Les espèces depilans et leporina seraient particulièrement nocives. On trouve aussi dans De Saint-Denis 1947, 54-55, la description de J. Oberthür : « Le lièvre de mer atteint la taille d’un petit levraut. Lorsqu’elle [l’aplysie] bosse le dos, tapie dans l’herbier, avec sa couleur fauve, camouflée de taches jaune clair, on dirait un peu un capucin au gîte, dans l’herbe de la prairie, d’autant plus que l’aplysie rabat d’avant en arrière ses cornes allongées et aplaties comme des oreilles ». Cependant, peu avant de traiter du lièvre de mer, Pline a consacré un court passage à l’aplysie, qu’il classe dans les éponges et ne semble pas associer au lièvre (Pessimum omnium genus est earum quae aplysiae uocantur, quia elui non possunt ; in quibus magnae sunt fistulae et reliqua densitas spissa (Plin. nat. 9, 150), « L’espèce la plus mauvaise de toutes est celle qu’on appelle aplysie, parce qu’il est impossible de la nettoyer ; ses tuyaux sont grands et le reste de sa masse est compacte » (De Saint-Denis 1955, 85)). Thomas de Cantimpré suit Pline en consacrant deux chapitres à deux types de lièvres. Dans leur commentaire à Albert le Grand (AM 24, 72 (39)) – qui lui aussi distingue deux types de lièvre de mer, réunis dans un même chapitre –, Kitchell & Resnick 1999, 1688, suivent D’Arcy Thompson 1947, 142-143, et suggèrent que le lièvre très toxique de l’océan Indien pourrait être le poisson-globe (Diodon Linné, 1758), et le lièvre moins dangereux des mers occidentales, l’aplysie.
Notes de traduction :
3. La source de Thomas de Cantimpré est indubitablement Pline, mais sans doute dans une version très fautive. Les informations sont déformées, notamment celles sur la pastenague, et l’ordre des mots tout à fait étrange. |
4. On trouve le même problème de déformation dans ce passage. Chez Pline, c’est la cendre de tête de murène qui est efficace contre ses propres morsures ; contre le poison du lièvre de mer, Pline recommande les hippocampes ou les crabes.