CopierCopier dans le presse-papierPour indiquer l’adresse de consultation« Thomas de Cantimpré - Livre de la Nature — Livre VII. Les poissons de mer ou de rivière.  », in Bibliothèque Ichtya, état du texte au 21/11/2024. [En ligne : ]
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Édité et traduit par Brigitte Gauvin ; Catherine Jacquemard ; Marie-Agnès Lucas-Avenel.

LIII. De multipede [le poulpe1identificationMultipes (traduction du grec πολύπους) et polippus (ou polypus), sont deux synonymes qui désignent le « poulpe » de Pline. Une rubrique est cependant consacrée à chacun des deux termes ici et chez Albert le Grand (AM 24, 79 (43) et AM 24, 100 (49)). Si Thomas de Cantimpré n’établit pas de lien entre les deux chapitres, Albert le Grand (AM 24, 100 (49)) précise, comme Vincent de Beauvais, que le polippus est aussi appelé multipes. Cette division vient peut-être du texte d’Isidore de Séville. Voir Isid. orig. 12, 6.]

Lieux parallèles : AM, Multipes (24, 79 (??)) ; HS, Multipes (4, 60). Cf. aussi Ambr. hex. 5, 8, 21, B.
2. [α] TC
[β] Arist. HA, 544 a 7 MS
[γ] Bas. hex.2, 12
[δ] Arist. HA, 544 a 7 MS
[ε] TC?
[ζ] Arist. HA, 544 a 7 MS
[η] Arist. HA, 590 b 10 MS
[θ] TC
[ι] Arist. HA, 622 b 6 MS
[α] Le poulpe, à ce que dit Pline, est un poisson de mer qui tire son nom de sa nature. En effet, comme l’animal terrestre du même nom2explicationIl faut sans doute voir dans le multipes terrestre le multipeda, ae, f, c’est-à-dire le scolopendre., il possède lui aussi beaucoup de pieds. Les pieds lui sortent du côté. [β] Ce poisson s’accouple en hiver3explicationC’est inexact ; le poulpe s’accouple toute l’année. et il se construit un nid de branchages parmi les autres poissons4explicationOn peut aussi comprendre « seul parmi les autres poissons » en supposant que Thomas, dans ce passage, cherche à souligner la singularité du poulpe, qui serait seul à se construire un nid de branchages parmi les poissons (mais le nid est signalé ailleurs, à propos de l’épinoche et du silure)..[γ] Basile le Grand prétend, lui, que c’est l’eau qui fait se développer l’œuf posé dans le nid5explicationVoir Ambr. hex. 2, 12 : Multi piscium non incubant suis ovis sicut aves nec nidos aedificant nec cum labore proprios natos enutriunt, sed aqua suscipiens ovum facit animal. dans l’eau et qui en fait sortir les petits6explicationThomas a sans doute fait une erreur sur les termes multi piscium présents dans le texte de Basile et a compris qu’il s’agissait du multipes. L’information qu’il tire de Basile est en contradiction avec celles tirées d’Aristote, ce que Thomas signale peut-être à travers autem..[δ] Le poulpe porte pendant deux mois un œuf, un seul et aussi petit qu’une noix7explicationLa femelle du poulpe pond plusieurs centaines de milliers d’œufs qui forment des grappes, et qu’elle accroche dans des creux de rochers.. Puis, après que la femelle a pondu l’œuf, elle s’installe pendant quarante nuits et le couve8explicationPendant plusieurs semaines, la femelle veille sur ses œufs et les ventile., et, par la suite, il en sort d’innombrables poissons.[ε] Or il faut qu’ils fassent beaucoup de petits : en effet, s’il n’y en avait pas beaucoup, leur espèce diminuerait parce qu’ils se mangent entre eux et que c’est un animal vorace. C’est pourtant un animal très fragile qui s’abîme assez rapidement, peut-être, justement, par excès de nourriture. Aristote : [ζ] La tête du mâle est plus longue que celle de la femelle. La femelle s’affaiblit considérablement à la ponte car la couvaison est très longue et, pendant ce temps-là, elle ne se met pas en quête de nourriture et ne s’alimente pas9explicationLa femelle du poulpe meurt après la ponte, non pour les raisons supposées par Thomas de Cantimpré, même s’il est vrai que la femelle ne s’alimente pas lorsqu’elle protège ses œufs, mais parce qu’elle est arrivée au terme de sa vie (deux ans environ) au moment de la ponte..[η] Le poulpe l’emporte sur la langouste, un animal marin monstrueux qui est pourtant robuste et puissant ; et il l’emporte par l’astuce plus que par la force. Et la preuve de sa supériorité, c’est que, parfois, quand on les trouve pris ensemble dans un filet, on trouve souvent la langouste morte ou mortellement blessée ;[θ] et, en cela il est donné de comprendre que la sagesse vaut plus que la force et que la victoire ne réside pas dans la vertu personnelle, mais qu’elle est un don du ciel.[ι] Il existe une espèce de poulpe naturellement astucieuse : afin de rendre la coquille de son dos dure et capable de résister aux flots salés de la mer et aux chocs des rochers, elle nage à la surface de l’eau en exposant la coquille de son dos au soleil afin qu’elle durcisse en s’asséchant10explicationThomas de Cantimpré n’a pas du tout compris ce passage, dans lequel Aristote décrit le mouvement de descente et de montée du nautile..

Notes d'identification :

1. Multipes (traduction du grec πολύπους) et polippus (ou polypus), sont deux synonymes qui désignent le « poulpe » de Pline. Une rubrique est cependant consacrée à chacun des deux termes ici et chez Albert le Grand (AM 24, 79 (43) et AM 24, 100 (49)). Si Thomas de Cantimpré n’établit pas de lien entre les deux chapitres, Albert le Grand (AM 24, 100 (49)) précise, comme Vincent de Beauvais, que le polippus est aussi appelé multipes. Cette division vient peut-être du texte d’Isidore de Séville. Voir Isid. orig. 12, 6.

Notes d'explication :

2. Il faut sans doute voir dans le multipes terrestre le multipeda, ae, f, c’est-à-dire le scolopendre. | 

3. C’est inexact ; le poulpe s’accouple toute l’année. | 

4. On peut aussi comprendre « seul parmi les autres poissons » en supposant que Thomas, dans ce passage, cherche à souligner la singularité du poulpe, qui serait seul à se construire un nid de branchages parmi les poissons (mais le nid est signalé ailleurs, à propos de l’épinoche et du silure). | 

5. Voir Ambr. hex. 2, 12 : Multi piscium non incubant suis ovis sicut aves nec nidos aedificant nec cum labore proprios natos enutriunt, sed aqua suscipiens ovum facit animal. | 

6. Thomas a sans doute fait une erreur sur les termes multi piscium présents dans le texte de Basile et a compris qu’il s’agissait du multipes. L’information qu’il tire de Basile est en contradiction avec celles tirées d’Aristote, ce que Thomas signale peut-être à travers autem. | 

7. La femelle du poulpe pond plusieurs centaines de milliers d’œufs qui forment des grappes, et qu’elle accroche dans des creux de rochers. | 

8. Pendant plusieurs semaines, la femelle veille sur ses œufs et les ventile. | 

9. La femelle du poulpe meurt après la ponte, non pour les raisons supposées par Thomas de Cantimpré, même s’il est vrai que la femelle ne s’alimente pas lorsqu’elle protège ses œufs, mais parce qu’elle est arrivée au terme de sa vie (deux ans environ) au moment de la ponte. | 

10. Thomas de Cantimpré n’a pas du tout compris ce passage, dans lequel Aristote décrit le mouvement de descente et de montée du nautile.