CopierCopier dans le presse-papierPour indiquer l’adresse de consultation« Albert Le Grand - Les animaux — Livre XXIV. Les animaux aquatiques.  », in Bibliothèque Ichtya, état du texte au 21/11/2024. [En ligne : ]
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Édité et traduit par Brigitte Gauvin.

<Syrenae [les sirènes1identificationAucun problème d’identification ne se pose ici, même si le terme sirena, dérivé du latin classique siren, n’apparaît que chez les poètes, et en premier lieu dans l’Odyssée. Il désigne tout d’abord la sirène ailée, cette créature fabuleuse à corps d’oiseau et à tête de femme, qui, de son chant, attirait pour leur perte les marins téméraires. Dans la mythologie gréco-romaine, les sirènes sont les filles du dieu-fleuve Achéloos et elles habitent une île de la Méditerranée, sur les rochers de laquelle les navires venaient se briser. La sirène pisciforme apparaîtra plus tardivement au Moyen Âge, par confusion probable avec certains animaux réels, comme le lamantin ou le dugong. Vers le xve siècle, l’image de la sirène moderne est fixée, notamment à travers les bestiaires et l’art ornemental : la sirène à queue simple ou double devient un motif très courant de la sculpture médiévale (Leclercq-Marx 1997). Thomas de Cantimpré recourt à plusieurs sources qu’il juxtapose sans essayer de leur donner de cohérence : dans son texte, les sirènes apparaissent d’abord comme des créatures féminines anthropomorphes aux longs cheveux portant des petits dans leur bras dont on détourne l’attention avec une bouteille jetée dans l’eau, puis, selon le mystérieux Adelinus, comme des créatures à corps et serres d’oiseau et à queue de poisson qui envoûtent par leur chant les marins qu’elles dévorent ensuite. Albert le Grand, qui abrège considérablement la notice de son prédécesseur, réunit toutes les informations : sous sa plume, les sirènes deviennent des créatures à triple nature, femme, oiseau et poisson, qui chantent et jouent avec les bouteilles vides que leur lancent les marins.]>

Source : TC, De syrenis (6, 46).
Lieux parallèles : VB, De syrene (17, 129) ; HS, Sirena (4, 83).
2. 119. Selon les fables des poètes, les sirènes sont des monstres marins ayant, pour le haut du corps, l’aspect de femmes aux seins longs et pendants, qui allaitent leurs petits ; elles ont un visage horrible, les cheveux longs et flottants ; pour le bas du corps, elles ont des pattes d’aigle, en haut du corps elles ont des ailes, et, derrière, une queue écailleuse grâce à laquelle elles se dirigent quand elles nagent. Lorsqu’elles apparaissent aux marins, elles montrent leurs petits et émettent des sifflements pleins de douceur grâce auxquels elles endorment ceux qui les écoutent ; et quand ils sont endormis, elles les mettent en pièces. Mais les marins sensés passent au milieu d’elles en se bouchant les oreilles et leur jettent des bouteilles vides avec lesquelles les sirènes jouent pendant que le navire poursuit sa route.

Notes d'identification :

1. Aucun problème d’identification ne se pose ici, même si le terme sirena, dérivé du latin classique siren, n’apparaît que chez les poètes, et en premier lieu dans l’Odyssée. Il désigne tout d’abord la sirène ailée, cette créature fabuleuse à corps d’oiseau et à tête de femme, qui, de son chant, attirait pour leur perte les marins téméraires. Dans la mythologie gréco-romaine, les sirènes sont les filles du dieu-fleuve Achéloos et elles habitent une île de la Méditerranée, sur les rochers de laquelle les navires venaient se briser. La sirène pisciforme apparaîtra plus tardivement au Moyen Âge, par confusion probable avec certains animaux réels, comme le lamantin ou le dugong. Vers le xve siècle, l’image de la sirène moderne est fixée, notamment à travers les bestiaires et l’art ornemental : la sirène à queue simple ou double devient un motif très courant de la sculpture médiévale (Leclercq-Marx 1997). Thomas de Cantimpré recourt à plusieurs sources qu’il juxtapose sans essayer de leur donner de cohérence : dans son texte, les sirènes apparaissent d’abord comme des créatures féminines anthropomorphes aux longs cheveux portant des petits dans leur bras dont on détourne l’attention avec une bouteille jetée dans l’eau, puis, selon le mystérieux Adelinus, comme des créatures à corps et serres d’oiseau et à queue de poisson qui envoûtent par leur chant les marins qu’elles dévorent ensuite. Albert le Grand, qui abrège considérablement la notice de son prédécesseur, réunit toutes les informations : sous sa plume, les sirènes deviennent des créatures à triple nature, femme, oiseau et poisson, qui chantent et jouent avec les bouteilles vides que leur lancent les marins.